À travers la fidèle reconstitution de l’atelier de l’ingénieux concepteur de la Sagrada Familia, l’expérience immersive Gaudí, l'Atelier du Divin, co-produite par GEDEON Experiences et Small Creative, invite les visiteurs à partager une expérience collective à la fois poétique et didactique. Agnès Garaudel, directrice de GEDEON Experiences et productrice de cette œuvre de réalité virtuelle, nous raconte la genèse du projet, né à partir d’un film documentaire, son développement, et nous dévoile les futures productions VR de GEDEON Experiences.
Unifrance : Pouvez-vous nous parler de la genèse du projet ?
Agnès Garaudel : GEDEON Programmes, d’abord producteur de documentaires, s’est lancé dans la création immersive en 2020, avec une stratégie multi-supports et la création de GEDEON Experiences, le département dédié à l’innovation et à la création d’expériences immersives. Lorsque nous avons eu l’idée de l’expérience VR Gaudí, l'Atelier du Divin, nous travaillions sur un film documentaire, "Sagrada Familia, le défi de Gaudí", avec l’ambition de raconter l’œuvre et l’histoire de Gaudí. Nous nous sommes rapidement aperçus que pour raconter l’histoire de ce maître de l’architecture, il nous fallait reconstituer son atelier, qui avait totalement disparu dans un incendie en 1936. Pour ce faire, nous avons entrepris une véritable enquête pour recréer cet espace disparu dans les flammes. Nous nous sommes plongés dans les archives de fondations et de journaux d’époque et avons retrouvé les rares photographies de l’atelier. Nous avons ainsi pu reconstituer chaque pièce, chaque objet en 3D, pour les besoins du film. Nous avons utilisé cette reconstitution de l’atelier en 3D dans un grand studio virtuel, équipé d’écrans LED. La réactivité du décor projeté sur ces écrans a permis de restituer la sensation que les personnages évoluaient réellement dans l’atelier. Ces séquences docu-fiction faisaient partie intégrante du projet du film. Nous nous sommes alors dit qu’il y avait une autre histoire à raconter, en utilisant des casques de réalité virtuelle, et nous sommes rapprochés du studio Small Creative, coproducteur de l’expérience.
En quoi l’histoire de Gaudí et de son œuvre se prêtait particulièrement au format VR ? Comment l’avez-vous pensé ?
Agnès Garaudel : La VR se divise en deux pans principaux. D’un côté les expériences Home VR, souvent solitaires, et de l’autre les expériences vécues de manière collective, dans des lieux dédiés, dites "location based". C’est dans cette seconde typologie que se situe Gaudí, l'Atelier du Divin. L’idée était de faire vivre une expérience qu’on ne peut pas vivre dans la réalité, à travers une histoire très narrative, grand public, pour toute la famille. Le public change totalement de position, de spectateur, il devient visiteur. Il s’agit d’une expérience d’une vingtaine de minutes, dans 50m2, en free-roaming, c’est-à-dire avec la possibilité de se déplacer librement dans l’espace réel et, dans le même temps, l’environnement virtuel. Un casque sans fil et deux manettes permettent une expérience multilingue et incarnée, au travers d’un avatar. Jusqu’à 6 visiteurs peuvent évoluer en même temps, chacun dans la langue de son choix. À ce jour, les langues disponibles sont le français, l’anglais, le japonais et le coréen. Le dispositif complet est finalement assez léger, avec des casques, et un ordinateur pour le lancement. Nous ciblons toute la famille, dès 8 ans, et avons souhaité créer du lien entre une technologie ludique et une expérience culturelle, narrative, apte à provoquer des émotions chez le visiteur.
Concernant la diffusion, dans quels territoires et quels contextes l’œuvre a-t-elle déjà pu rencontrer son public jusqu’à présent, notamment à l’international ?
Agnès Garaudel : Gaudí, l'Atelier du Divin est en tournée pendant un an au Japon et a été co-produite avec la NHK, la télévision publique japonaise et le partenaire historique de GEDEON Programmes, qui opère l’expérience sur place depuis déjà 6 ou 7 mois avec des retours très positifs. En France, l’expérience est accessible dans le réseau de salles de divertissement en réalité virtuelle Illucity, qui compte 5 salles à travers le territoire.
L’œuvre a également pu rencontrer son public en festivals, où elle a été récompensée du Grand Prix du Public au Festival Pixii à La Rochelle, du Prix Best Heritage Experience aux European XR Awards à Bruxelles, et du troisième Prix au Festival Beyond The Frame à Tokyo !
Elle sera prochainement présentée aux Etats-Unis, à la fin du mois de janvier, lors du festival Animation First à New York, organisé par la FIAF.
--> Pour découvrir l’expérience dans les salles Illucity
Quels sont les atouts de cette expérience pour séduire les publics internationaux et s’exporter dans le monde ? Quels futurs envisagez-vous pour cette expérience ?
Agnès Garaudel : L’art et l’architecture sont des sujets qui irradient le monde, et qui suscitent un fort intérêt des publics internationaux. L’essence même de ce projet crée un engouement.
D’un point de vue pratique, le caractère multilingue, la légèreté du dispositif, avec un set up simple, et la facilité de prise en main du logiciel et du système de pilotage, rendent la mise en place de cette expérience clé en main très accessible. C’est le niveau de maturité atteint par les technologies immersives qui permet d’arriver aujourd’hui à cette simplicité. Nous avons voulu utiliser ces outils à bon escient, pour raconter une histoire. La technologie s’oublie pour se mettre au service de l’histoire et de la connaissance.
Nous aimerions pouvoir distribuer l’œuvre dans les salles VR, les musées, les espaces culturels. C’est une expérience qui se vit dans un espace physique, de manière collective. Nous avons pensé le dispositif pour accompagner les exploitants, les institutions et leur permettre d’attirer de nouveaux publics, notamment le jeune public. Nous tissons des liens privilégiés avec les institutions culturelles pour les accompagner dans la transition des espaces d’exposition (video mapping, VR,…). Nous avons notamment coproduit avec la RMN Grand Palais l’expérience immersive Pompéi, présentée au Grand Palais en 2020, créé en collaboration avec le site archéologique de Pompéi, projet dont nous sommes à l’initiative.
Ce dispositif permet au spectateur de voyager dans le temps, quels sont vos futurs projets dans ce sens ? Y a-t-il une réelle volonté de transmission d’un patrimoine disparu ?
Agnès Garaudel : C’est en effet dans cette direction que nous avons pensé nos projets. Nous souhaitons proposer des voyages dans le temps et dans l’espace, des expériences incarnées, pour permettre au grand public de découvrir les hauts lieux du patrimoine disparu de manière innovante et ludique. Faire découvrir des lieux qu’on ne peut plus découvrir dans la réalité, à travers des histoires contées par de grandes personnalités historiques.
Nous sommes à l’origine d’un projet majeur sur le point d’être présenté au public. L’expérience "Un soir avec les impressionnistes Paris 1874", coproduite avec le studio Emissive et le musée d’Orsay, sera déployée dans la galerie Hamon à Orsay du 26 mars au 11 août 2024. Elle permettra aux visiteurs de découvrir pour la toute première fois la première exposition impressionniste de 1874, boulevard des Capucines, dans l’atelier du célèbre photographe Nadar. Au même titre que pour Gaudí, les équipes de GEDEON Experiences ont fait un gigantesque travail de recherche pendant deux ans, puis un travail de reconstitution en 3D pour permettre de recréer ce moment très important dans l’histoire de l’art. Jusqu’alors, personne ne savait précisément à quoi ressemblait cette première exposition. En analysant de nombreux documents, comme les correspondances entre les peintres, les plans cadastraux de l’époque, les articles de journaux, nous avons été en mesure de recréer l’atelier et la façade du bâtiment en images de synthèse, le boulevard des Capucines de 1874, reproduire l’accrochage des peintures au plus proche de la réalité historique. Nous avons approché les équipes du musée d’Orsay avec ce travail inédit, et c’est à cet instant que le projet global a été décidé.
Le musée d’Orsay consacrera 700m2 à cette expérience, complémentaire à l’exposition Paris 1874, inventer l'impressionnisme, qui célébrera les 150 ans de la naissance du mouvement et réunira quelques 130 œuvres. 100 visiteurs pourront vivre cette expérience VR grand format de manière simultanée, précédée d’un pre-show et suivi d’un post-show sous forme de vidéo mapping. L’exposition se déplacera ensuite à l’international.
--> Pour en savoir plus
ENG : https://www.musee-orsay.fr/en/whats-on/exhibitions/tonight-impressionists-paris-1874
GEDEON Programmes produit également un film documentaire, "1874, la naissance de l’impressionnisme". Pour la toute première fois, le public pourra découvrir avec ce film ce moment clé jusqu’alors dénué de représentation visuelle, découvrir les jeunes peintres impressionnistes, leurs influences, leurs méthodes de travail, les régions qui les ont inspirés. Avec ce film, en parallèle de l’expérience immersive VR, nous souhaitons créer une expérience multicanale, à 360° ! Nous avons collaboré avec les commissaires d’Orsay qui valident scientifiquement la véracité historique de l’ensemble de cette production documentaire et immersive.
Nous travaillons également sur la découverte des jardins disparus du Château de Versailles, de la grotte de Téthys au Labyrinthe, en passant par la Ménagerie Royale, qui sera présentée en juin 2024 et contée par le jeune Louis XIV. Une expérience coproduite avec Small Studio, en partenariat avec le Château de Versailles.