Si le manifeste du cinéma futuriste de 1916 envisageait l'hypothèse d'un film où ne joueraient que des gros-plans de mains et de pieds, Autant-Lara réalise ce programme dès l'ouverture de Fait-divers : des mains gantées, des gestes lents ou prestes suffisent à signifier la rencontre amoureuse, la demande en mariage, l'effusion. Ce laconisme, ces images ayant presque valeur de hiéroglyphes, enchantèrent Antonin Artaud, interprète du film, qui le mettait au-dessus des œuvres d'Epstein car, disait-il, on n'y trouve ni « fait », ni « anecdotes » mais une « émotion d'images » « d'une rigueur absolue ». À l'inverse Robert Desnos, défenseur des intertitres, le jugea raté.
Le film pour autant ne se borne pas aux seules ressources des procédés optiques ou figuraux (métonymie, métaphore, pars pro toto), il s'appuie aussi sur le jeu de trois acteurs d'importance : outre Antonin Artaud déjà cité, Madame Louise Lara, la mère du cinéaste et Pierre Barthet, trois corps, trois visages, trois types de jeu très caractérisés dont la caméra capte la photogénie autant qu'elle construit la représentation sur la base de conventions, de codes. Lors d'un épisode dans un dancing, le décorateur Autant-Lara donne sa mesure en une scène à la perspective accusée, graphique et à la décoration Arts Déco affichée dont se souviendra bien plus tard Jean-Christophe Averty. C'est Arthur Honegger qui écrit la partition musicale de ce film que le réalisateur retravailla à l'aide des ondes Martenot. Si la sortie du film aux Ursulines s'avéra incompatible avec ce type d'expérience elle fut, semble-t-il, tentée lors des « séances de lumière » d'Art et Action où des projections et compositions lumineuses de Man Ray et des projections colorées d'André Girard alternaient avec des documentaires, du théâtre et Fait divers.
Source : dvdtoile.com