L'actualité au jour le jour du Festival du film français au Japon
Daily Festival / Festival du film français au Japon 2019 - #3 - Juin 2019
SOMMAIRE

Portfolio

22 juin - 3e jour du Festival

Troisième journée du Festival sous le ciel lourd de Yokohama, mais porté par le coeur léger des cinéastes et artistes qui, toute la journée, vont venir au Aeon Cinéma de Minato Mirai pour présenter leurs films et rencontrer le public japonais, toujours chaleureux.

Ce samedi, ce sont successivement Michel Ocelot (pour Dilili à Paris), Louis-Julien Petit (pour Les Invisibles), Lisa Azuelos et Thaïs Alessandrin (pour Mon bébé), Antonin Baudry et François Civil (pour Le Chant du loup) et enfin Sébastien Marnier et sa productrice Caroline Bonmarchand (pour L'Heure de la sortie), qui ont goûté au plaisir des rencontres avec le public japonais, d'abord en salle après chaque projection, pour un débat, puis dans l'espace réservé aux séances de dédicaces où les petits cadeaux continuent de pleuvoir.

Le matin, Claude Lelouch partait pour l'université de Waseda où une masterclass lui était consacrée, ponctuée de nombreux extraits des films qui ont marqué sa longue carrière. Dans la salle, un étudiant pas comme les autres, un certain Hirokazu Kore-Eda...

Et deu leur côté, Mikhaël Hers et Vincent Lacoste ont pris la route de Tokyo, pour aller fait la tournée des salles où est projeté Amanda, qui sortait aujourd'hui au Japon.

Demain, pour le dernier jour du festival, ce sera au tour de Nadav Lapid (Synonymes), Judith Davis (Tout ce qu'il me reste de la révolution) et Nils Tavernier (L'Incroyable Histoire du facteur Cheval), de venir rencontrer le public, pour les ultimes séances de cette 27e edition.

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La phrase du jour

Une femme anonyme, venue à la rencontre de Louis-Julien Petit

Lors du débat qui a suivi la projection des Invisibles, presque uniquement des hommes ont pris la parole, demandant notamment à Louis-Julien Petit s'il n'était pas trop dur de diriger des femmes. Pendant la séance d'autographes qui a suivi, plusieurs femmes sont venues se confier au réalisateur, dont une, qui a connu la rue, et qui lui a dit :

"Quand on est une femme pauvre au Japon, il y a deux combats à mener de front : celui d'être une femme, et celui de se battre contre la précarité."

Il n'y a pas de mot japonais pour dire "sans-abri", c'est le mot anglais "homeless" qui est utilisé.

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L'image du jour

Hirokazu Kore-eda, perdu dans la foule d'étudiants venus assister à la masterclass de Claude Lelouch

C'est en toute discrétion que Hirokazu Kore-Eda, lauréat de la Palme d'or au Festival de Cannes en 2018 pour Une affaire de famille, est venu assister à la masterclass de Claude Lelouch, donnée à la Waseda University, alors qu'il avait été invité à participer activement à la masterclass. Il s'est humblement mêlé aux 387 étudiants présents pour laisser au seul Claude Lelouch le soin de revenir sur l'ensemble de sa carrière...

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Le chiffre du jour

539

C'est le nombre de rendez-vous qui ont eu lieu entre les 28 exportateurs français présents au Marché du film de Tokyo et les 28 distributeurs japonais venus à leur rencontre. Outre les deux journées à Tokyo, les rendez-vous se sont poursuivis à Yokohama sur toute la durée du festival, certains exportateurs français n'ayant pu rencontrer tous les interlocuteurs souhaités pendant le marché. Espérons que ces rendez-vous porteront leurs fruits : en 2018, 53 films français sont sortis au Japon. Le premier film français majoritaire en langue française sorti au Japon en 2018 est Maria by Callas (dont la carrière s'est toutefois majoritairement déroulée en 2019) avec un cumul total de 84.961 entrées.

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3 questions à

... Caroline Bonmarchand, productrice

A la tête d'Avenue B depuis 2002 – après un séjour new-yorkais où elle a débuté en produisant les films de Raphaël Nadjari, Caroline Bonmarchand a produit depuis une quinzaine de films sous cette bannière, notamment ceux de Marc Fitoussi (3 films, 1 court et 2 documentaires), de Sophie Letourneur, et les deux films de Sébastien Marnier, Irréprochable et L'heure de la sortie, présenté au Festival. Elle accompagne Sébastien Marnier à Yokohama, notamment pour y rencontrer le distributeur japonais.

Ce voyage à Yokohama est-il votre première expérience au Japon ?

C'est en tout cas ma première expérience avec un film. La Ritournelle de Marc Fitoussi y était sorti mais je n'avais pas fait le déplacement. Il est assez rare que les producteurs voyagent avec les films, mais pour L'Heure de la sortie, c'est un peu particulier : très vite, quand il a été terminé et qu'on a discuté avec Hengameh Panahi de Celluloid Dreams, qui s'occupe des ventes, elle nous a dit que c'était un film fait pour le Japon, notamment du fait des thématiques environnementales et de la menace nucléaire, qui y sont évoquées. Et on a effectivement ressenti, pendant ces quelques jours passés ici, que ce pressentiment n'était pas faux : au-delà des réactions du public, il y a eu aussi des remarques que les journalistes ont pu faire à Sébastien, et les discussions que l'on a eues avec notre distributeur, King Records Co.. Le film leur parle, c'est évident, même s'il peut y avoir des différences culturelles. Je pense par exemple aux questionnements qu'ils ont sur l'arrogance des enfants dans le film, même si on précise toujours que ces enfants ne reflètent pas forcément la jeunesse française ! On a posé beaucoup de questions au distributeur, sur la manière dont la jeunesse japonaise avait vécu la catastrophe de Fukushima, et quels bouleversements cela avait généré chez eux, mais il semble que s'il y a eu des bouleversements d'un point de vue individuel, rien de fondamental n'a changé d'un point de vue collectif et politique. Par contre ils ont bel et bien vécu un traumatisme, et ils le racontent de la même manière – où ils étaient, ce qu'ils faisaient ce jour-là – que nous le faisons en France suite aux attentats de 2015, et cela crée aussi un point de jonction.

Comment s'est fait la vente du film pour le Japon ?

King Records s'est intéressé au film dès la projection à Venise, qui était la première mondiale. Ils l'ont beaucoup aimé, mais ils n'avaient encore jamais distribué de film français, et surtout ils sont spécialisés dans le film de genre. Or L'Heure de la sortie n'est pas un film de genre à proprement parler, il se situe dans un entre-deux, ni genre ni totalement arthouse, et du coup ils ont préféré revoir le film au Festival de Sitges, et c'est là qu'ils ont franchi le pas et décidé de le prendre en distribution au Japon. On est partis sur une distribution salles, calée sur octobre prochain. Pour eux, c'est du arthouse, pas du film de multiplexe, ce qui est logique de leur point de vue, et ils étaient très amusés de savoir qu'en France le film a plutôt été programmé en multiplexe, là où pour eux il n'y a que de la place pour les blockbusters américains. Pour la suite, j'imagine que les choses s'affineront en fonction de la réception du film. En tout cas ils semblaient très heureux de nous avoir au Japon pendant quelques jours, et de constater que Sébastien ait pu rencontrer la presse de manière assez intensive. Il a passé deux jours enfermé dans une chambre d'hôtel à répondre aux questions de beaucoup de titres, pas seulement issus de la presse spécialisée d'ailleurs, et heureusement avec l'aide d'une interprète géniale qui a beaucoup travaillé. Pour King Records, c'est un formidable signal de percevoir cet intérêt de la presse pour le film, c'est très rassurant.

Vendre un film comme L'Heure de la sortie au Japon, c'est important pour vous en tant que productrice ?

C'est essentiel, parce que cela participe à l'objectif que l'on s'était fixé avec Sébastien, qui était de faire connaître ce film à l'international, c'est un film que l'on voulait vraiment partager en dehors de nos frontières, par rapport aux sujets qu'il soulève. Et il s'est vendu dans une quinzaine de territoires, ce qui est vraiment bien, d'autant qu'il n'a pas été un gros succès en France. Il a fait 100.000 entrées, alors qu'Irréprochable en avait fait 200.000. Mais la première à Venise a immédiatement positionné le film à l'international, et la détermination et le travail acharné d'Hengameh Panahi et de ses équipes, qui travaillent chaque territoire à fond, ont fait le reste. Pour nous c'est très émouvant de se souvenir que l'on parlait de ce film, Sébastien et moi, il y a deux ans et demi, et de se retrouver là, aujourd'hui, à Yokohama, devant un public dont on pourrait se dire qu'il est tellement loin de nous, alors qu'en même temps nous partageons le même langage, celui du cinéma. Quand on parle du film, on évoque Le Ruban blanc, Magnolia, Le Village des damnés, et tout le monde se comprend ! Pareil avec nos distributeurs : on dîne avec ces dix personnes qu'on ne connaît pas, tout paraît chronométré, hiérarchisé et codifié, rien à voir a priori avec nos rendez-vous en France, et pourtant on va passer un dîner délicieux où l'on va parler de Parasite et de cinéma français, grâce à cette langue commune qui nous relie tous et qui est essentielle. Comme est essentiel le fait qu'UniFrance continue à faire exister, grâce à ce genre de festival, ces rencontres humaines qui amènent ensuite à faire du business, à vendre les films et à pouvoir les montrer au monde entier.

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